Dans cette deuxième partie, nous poursuivons notre escapade abstraite en nous dirigeant vers la ville de Minami-Kyûshû dans le département de Kagoshima, situé au sud de l’île de Kyûshû.
Si vous n’avez pas encore lu la première partie de cette série d’articles, centrée quant à elle sur la ville de Fukuoka, vous pouvez la retrouver en cliquant sur le lien ci-dessous :
Sommaire
- L’origine de Minami-Kyûshû
- L’héritage de Chiran
- Le thé de Chiran
- Chiran sous toutes ses formes
- Sources et Ressources
- Commentaires
L’origine de Minami-Kyûshû
Contrairement à la plaque traitée dans l’article précédent qui ne portait à première vue aucun signe distinctif de la ville de Fukuoka, nous pouvons cette fois-ci discerner un logo en haut à droite. Il se compose d’un cercle et de deux courts segments parallèles situés dans sa moitié supérieure droite. Manque de chance, ce logo n’est pas celui de Minami-Kyûshû et semble ne plus être utilisé mais peut-être nous fournira-t-il tout de même quelques indices.
En creusant un peu, il s’avère en effet que ce logo est une stylisation du katakana « chi » チ et qu’il était celui de la ville de Chiran entre le 21 août 1973 et le 1er décembre 2007, date à laquelle les communes d’Ei, Chiran et Kawanabe ont fusionné pour devenir la ville de Minami-Kyûshû.
Pour mieux comprendre ce qui est représenté sur cette plaque de regard de chaussée je vous invite tout d’abord à me suivre à la découverte de Chiran, ses alentours et son patrimoine.
L’héritage de Chiran
Les demeures de samouraïs
Une promenade dans la rue bukeyashiki de Chiran, vous fera remonter dans le temps et vous permettra de découvrir le cadre de vie des samouraïs de la région de Satsuma. Ce n’est en effet pas pour rien que Chiran est surnommé « la petite Kyôto de Satsuma ». A travers le Japon, sur les 24 sites où sont préservées des demeures de samouraïs (bukeyashiki, 武家屋敷), 10 sont classées en zone de préservation des bâtiments traditionnels importants (Jûyô dentôteki kenzôbutsugun hozonchiku, 重要伝統的建造物群保存地区) dont ce quartier de Chiran qui appartient à cette liste depuis le 30 novembre 1981.
En plus de vous replonger dans le passé en sillonnant entre les enceintes édifiées entre le 15ème et le début du 17ème siècle de part et d’autre de cette rue longue de 700m, vous pourrez également visiter les jardins de 7 demeures.
Six jardins secs (style karesansui) :
- 1-Jardin de Keiichirô SAIGÔ
(西郷恵一郎庭園) - 2-Jardin de Katsumi HIRAYAMA
(平山克己庭園) - 3-Jardin de Ryôichi HIRAYAMA
(平山亮一庭園) - 4-Jardin de Mifune SATA
(佐多美舟庭園) - 5-Jardin de Tamiko SATA
(佐多民子庭園) - 6-Jardin de Naotada SATA
(佐多直忠庭園)
Un jardin avec collines et étang (style tsukiyama-sensui) :
- 7-Jardin de Shigemitsu MORI
(森重堅庭園)
Le musée pour la paix et à la mémoire des pilotes kamikazes
Tout comme les villes de Hiroshima ou de Nagasaki, Chiran possède son musée pour la paix (Chiran Tokkō Heiwa Kaikan,
Le thé de Chiran
La ville de Chiran est également reconnue pour son thé vert. De 1996 à 2002, elle a remporté chaque année le concours national de la “meilleure région productrice de sencha”. Forte d’une tradition de plus de trois siècles, la production de thé vert de Chiran bénéficie de conditions climatiques uniques par rapport au reste de la péninsule de Satsuma. L’un des meilleurs sencha du Japon est cultivé dans la partie montagneuse de Chiran, située au nord de la ville. Le reste de Chiran, plus plat, permet la production d’autres thés et surtout une mécanisation des cultures afin de proposer un thé de qualité à des prix moins élevés.
Aujourd’hui, le nom de Chiran perdure à travers la marque protégée « Chiran-cha » déposée en 2006. Suite à la fusion des communes d’Ei, Chiran et Kawanabe, la ville de Minami-Kyûshû est la ville produisant le plus de thé vert au Japon, faisant de Kagoshima le deuxième département producteur de thé.
Chiran sous toutes ses formes
Maintenant que nous avons étudié les grandes lignes de ce qui constitue l’identité de Chiran, nous pouvons nous pencher sur cette plaque de regard de chaussée. Contrairement à celle de Fukuoka, il nous semble que cette fois les formes géométriques sont organisées selon un certain ordre. S’il n’existe que peu d’informations sur la signification de ces formes, je vous présente tout de même l’interprétation qu’en donne la mairie de Minami-Kyûshû.
L’ex-logo de Chiran nous permet de deviner le sens de lecture de la plaque et de l’orienter correctement. Il se situe alors en haut à droite.
La production agricole
- Le contour crénelé de la plaque correspondrait aux champs de thé qui entourent la ville.
- Les 8 cercles qui se remplissent en allant de la droite vers la gauche, symboliseraient la production du thé et le développement industriel. Quant aux 5 carrés en dessous, ce serait une représentation des usines de thé. La partie en bas à droite, figurerait la côte sud de Kagoshima.
- Au centre de la plaque, les 6 ovales représenteraient des étables. Le carré dans un autre carré à droite, marquerait la position de la colline Takatsuka (Takatsukaoka,
高塚丘). Elle est aussi surnommée la colline Chabakken (Chabakken’oka, 茶ばっけん丘) car elle offre une vue spectaculaire sur les champs de thé jusqu’à la mer. - Les deux arcs de cercles en bas à droite représenteraient la côte au sud de la péninsule de Satsuma.
Les lieux à visiter
- Le musée pour la paix serait représenté à gauche par le cercle duquel sort une diagonale qui remonte vers la droite. La flèche qui s’en échappe symboliserait la transmission d’un message de paix.
- Les demeures des samouraïs seraient symbolisées par les trois carrés alignés en haut à gauche. Il ne semble donc pas y avoir de correspondance avec le nombre réel de demeures.
- Le Mont On’nai (On’naidake, 大隣岳), un autre point culminant du sud de Chiran, serait représenté par le demi-rond en bas à gauche. Cette position pourrait correspondre à peu près à sa localisation par rapport à la colline Chabakken, mais pas avec les autres repères.
La terre, la plaine et la mer : Chiran
Selon la mairie de Minami-Kyûshû, il existerait une manière complémentaire avec l’analyse ci-dessus d’interpréter ces motifs. Le tiers supérieur représenterait alors la terre et le nord de Chiran, la bande centrale, les plaines et le tiers inférieur, la côte. Ainsi chaque partie correspondrait à un kanji : terre (tsuchi, 地), plaine (hara, 原) et mer (umi, 海), leur association permettant de former le nom Chi-Ra-Mi qui aurait donné Chiran.
En conclusion, parmi les trois designs de cette série, celui de cet article est sans aucun doute celui qui comporte le plus de références à des repères concrets. Néanmoins, leur représentation par des formes simples ne dissipe aucune incertitude. Finalement, cette plaque est à mi-chemin entre la répétition de motifs géométriques purement pratique et décorative et la représentation figurative de spécialités ou de lieux célèbres de la ville.
Je vous donne désormais rendez-vous dans le prochaine article pour découvrir la prochaine et dernière étape de notre périple : la ville Nagoya dont nous avons déjà eu l’occasion d’étudier quelques plaques de bouches d’incendie.
- Cent ans bien arrosés à Nagoya
- Le patineur géant de Nagoya
- Les poissons-tigres du château de Nagoya
- Un autre château à Nagoya
Sources et ressources
Photo (pic.1) courtesy of Nieponmh
- Chiran Residence Samurai Complex
- Détail des styles de jardins et architecture défensive
- Chiran Samurai District, Japan Guide
- La bataille d’Okinawa
- Lire le reportage d’Asialyst : « Japon, les kamikaze, la paix et le devoir de mémoire »
- Présentation touristique du musée de Chiran
- Office du tourisme de Kyûshû
- Chiran Tokko Museum, Japan Guide
- Pour en savoir plus sur la production de thé de Chiran
- Histoire de la production de thé de Chiran
- Chiran Tea, ouverture d’une usine 2018
- Chiran et la production de thé du Japon
- Interprétation des formes